Vendre de l'or en Allemagne

Du côté allemand en région frontalière, les commerces de rachat de métaux précieux sont en plein essor et plus de 90% de la clientèle est française. Comment expliquer ce phénomène ?

Le consommateur, est-il suffisamment protégé lorsqu’il franchit le Rhin pour vendre de l’or ?

Le CEC a mené l'enquête sur le terrain.

La vente de métaux précieux en Allemagne

Comme en France, les prix de la vente de l’or sont libres en Allemagne. Il est conseillé de comparer les offres de plusieurs comptoirs d’or afin d’obtenir le meilleur prix.

La réglementatioallemande concernant le rachat de métaux précieux est beaucoup moins stricte que la réglementation française : paiement effectué directement, parfois en espèces, transaction anonyme, pas de taxe prélevée par l'Allemagne.

Pas étonnant alors que de nombreux Français franchissent la frontière soit pour vendre leur or, soit pour ouvrir un comptoir d'or. En réalité, ils sont aussi juridiquement moins protégés.

Contrairement à la pratique en France, le commerçant en Allemagne n’a pas d’obligations d'informer le consommateur précisément sur les prix, ni de respecter certaines règles protectrices comme établir obligatoirement un contrat écrit.

En France, le commerçant doit consigner dans un registre appelé « livre de police » les objets qu’il achète, leur description, ainsi que l’identité du vendeur, peu importe le montant de la transaction.

Ce n’est pas le cas en Allemagne, à condition que le montant de la transaction ne dépasse par le seuil de 10 000 euros. Dans la pratique, certains comptoirs allemands demandent au vendeur leur carte d’identité, mais pas toujours. La transaction peut être effectuée de manière complètement anonyme.

Contrairement à la France, le paiement est effectué en Allemagne immédiatement, en espèces ou par virement bancaire.

Enfin, il n’existe pas d’obligation de respecter un délai de rétractation non plus, contrairement à la législation française qui prévoit un délai de rétractation de 48 h.

Par ailleurs, aucun impôt n’est prélevé par l’administration fiscale allemande (« Finanzamt »). Les comptoirs ne leur transfèreraient aucune information par rapport à leurs activités.

En revanche, dans la pratique, les comptoirs subiraient des contrôles fiscaux réguliers et il existerait des échanges d'informations entre le Finanzamt et le Fisc français.

Quelles sont vos obligations si vous vendez de l'or ?

Déclarer au Fisc

Contrairement à ce que peut suggérer la publicité de certains comptoirs, vous devez obligatoirement déclarer l’opération et régler une taxe aux services fiscaux français au moyen du formulaire cerfa n° 11294*12. Il existe deux options possibles :

Si vous disposez d’un justificatif permettant de prouver la date d’acquisition du bien (facture, d’achat, acte de donation, déclaration de succession…), vous pouvez opter pour la taxation de la plus-value (TPV).

Vous serez imposé à 34,5% sur votre gain. Vous bénéficiez d’un abattement de 5% par année de détention à partir de la 3ème année. Vous êtes donc totalement exonéré si vous détenez cet or depuis plus de 22 ans.

Si vous ne pouvez pas apporter un tel justificatif, vous devez régler la taxe forfaitaire sur les métaux précieux (TFM) égale à :

  • 11 % du prix de vente, ou de la valeur en douane, pour les métaux précieux ;
  • 6 % du prix de vente, ou de la valeur en douane, pour les bijoux ou objets d'art, de collection ou d'antiquité, à partir de 5 000 euros.

Si vous ne déclarez pas votre opération au Fisc, vous êtes passibles de sanctions.

La contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) de 0,50 % s'applique également, sauf si vous n’êtes pas fiscalement domicilié en France.

 

Déclarer aux services des douanes

Par ailleurs, toute personne (résidente française ou non) qui traverse la frontière avec une somme, des lingots ou des pièces d'or pour un montant total égal ou supérieur à 10 000 euros doit effectuer une déclaration à la douane française.

Cela ne concerne pas les bijoux en métaux précieux. La déclaration doit être déposée au moyen du formulaire cerfa n°13426 et déposée soit directement auprès du service des douanes au moment de l'entrée ou de la sortie du territoire français, soit via le service en ligne DALIA entre 30 et 2 jours auparavant après création d'un compte d'utilisateur.

Si vous n’effectuez pas cette formalité, vous êtes passible d’une amende égale à 50% de la somme que vous transportez et la retenue temporaire voire la confiscation de la totalité des fonds par la douane.

La réglementation allemande est moins stricte : à l'occasion d'un contrôle, vous devez simplement signaler oralement ("Anzeigepflicht") aux agents que vous voyagez avec une somme, des pièces ou des lingots pour un montant égal ou supérieur à 10 000 euros.

Toutefois, si vous ne le faites pas, vous pouvez recevoir jusqu'à un million euros d'amende.

Les conséquences dans la région frontalière

Sur le terrain, le CEC a observé :

  • Une clientèle majoritairement française dans les comptoirs d’or installés en Allemagne dans la région frontalière. La publicité (panneaux, flyers, publicité dans les journaux et sur internet) en témoigne.
  • Les employés et propriétaires des comptoirs d’or sont souvent français. Sur les flyers et encarts publicitaires est parfois donné un numéro de téléphone +33.


Le CEC a recueilli des témoignages de commerçants installés à Kehl. La grande majorité de leur clientèle à Kehl serait française, 5 % Autrichiens et 2 % Allemands.

Ce constat s’explique par le fait que la réglementation allemande est moins stricte dans ce secteur qu’en France.

En réalité, si certains y voient un avantage, le consommateur qui vend de l'or en France est juridiquement davantage protégé que celui qui vend de l'or en Allemagne.

Quels sont les risques encourus ?

  1. Le consommateur est moins bien informé au préalable ;
     
  2. Le consommateur français qui ne respecte pas ses obligations peut subir un redressement fiscal ou de lourdes sanctions par la douane.

Attention ! Les publicités des comptoirs d’or installés en Allemagne sont rédigées souvent en français et utilisent des slogans tels que "PAIEMENT CASH, ZERO TAXES".

En réalité, si aucune taxe n’est prélevée en Allemagne, l’opération doit bien être déclarée au Fisc français. Attention donc aux offres trop alléchantes !

Le Finanzamt a confirmé au CEC que des échanges d’informations étaient bien effectués entre les autorités fiscales allemandes et françaises.